Violences conjugales : vers une réforme
Les violences conjugales sont au centre de l’actualité. A grand renfort de battage médiatique, le gouvernement actuel entend en faire sa pièce maîtresse de sa politique pénale. Les violences conjugales sont-elles la priorité à avoir en matière de politique pénale ? Quelle réalité existe derrière cette notion ? Une infraction certainement.Que signifierait l’intégration d’un crime de féminicide vu que c’est comme cela qu’il a été appelé ?
Actuellement les violences conjugales sont une infraction délictuelle ou criminelle. D’une part il existe les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner prévu à l’article 222-7 du Code pénal et d’autre part il existe les infractions délictuelles prévues aux articles 222-9 et suivants du même code. Dans un cas comme dans l’autre les violences conjugales sont prévues par un article qui parle des circonstances aggravantes de l’infraction.
Elles sont ainsi mentionnées à l’alinéa 4 ter de l’article 222-8 du Code pénal :
« Sur le conjoint, les ascendants ou les descendants en ligne directe ou sur toute autre personne vivant habituellement au domicile des personnes mentionnées aux 4° et 4° bis, en raison des fonctions exercées par ces dernières »
C’est également le cas pour les violences délictuelles avec un renvoi systématique à l’article suivant l’infraction de violence.
A chaque fois la circonstance fait que les peines prévues sont augmentées. Par exemple pour des violences conjugales ayant entraîné la mort sans intention de la donner, la peine sera de vingt années de réclusion criminelle au lieu de quinze années. Toutefois, comme on le voit, il n’existe pas une infraction qui serait spécifique aux violences conjugales. Celles-ci font partie des infractions prévues et sont réprimées comme toutes les autres infractions par le biais d’un procès pénal devant un tribunal avec l’obligation pour le procureur de la république de rapporter la preuve de l’infraction et la possibilité pour l’accuser de bénéficier de la présomption d’innocence jusqu’à son éventuelle condamnation.
Si on lit les propositions du gouvernement sur le plan judiciaire (donc la modification de la loi pour lutter contre les violences conjugales) celui-ci entend créer des chambres d’urgences qui auraient apparemment pour mission de juger des dossiers de ce type dans un délai de quinze jours. Autre mesure proposée une mise en place d’un bracelet électronique anti-rapprochement du compagnon (oui l’article en question ne mentionne l’accusé comme étant forcément du sexe masculin alors que des violences conjugales peuvent avoir lieu d’une épouse sur un époux, ou d’une épouse sur une épouse). Ce bracelet devrait empêcher la réitération des violences conjugales en créant un signalement automatique en cas de présence du conjoint à proximité de la victime ou de la partie civile.
Si ces mesures adviennent, il est difficile de voir comment elles vont réellement contribuer à lutter contre les violences conjugales. Car elles s’attaquent aux conséquences du problème et non pas à ses causes. Juger plus vite les prévenus de violences conjugales ? Cela pose déjà la question des moyens techniques. Généralement une audience correctionnelle se tient à un délai de six mois. Mais en cas de violences conjugales on passerait à seulement quinze jours ? Matériellement cela semble peu possible sauf à créer des juridictions spécialisées mais qui fonctionne également avec des juges qui siègent dans d’autres chambres et dont le temps n’est pas extensible.
Un bracelet anti-rapprochement semble encore plus une mesure théorique. Le port du bracelet électronique est déjà prévu et fonctionne très mal. Il devrait être la norme en matière de contrôle judiciaire mais il est plutôt l’exception là où la détention provisoire est la règle. Si les magistrats ne l’utilisent déjà que trop peu actuellement, il n’y a aucune raison qu’en créant un autre bracelet électronique celui-ci soit plus utilisé.
Les violences conjugales ne sont pas une infraction en soi. Le fait de faire usage de violences est une infraction suffisante. Cette infraction n’a pas besoin d’être modifiée pour satisfaire une volonté politique.