Ordonnance du juge d’instruction : pourquoi les contester
L’ordonnance du juge d’instruction est une décision prise par celui-ci qui concerne une personne mise en examen par exemple une ordonnance de placement en détention provisoire. Le mot « ordonnance » assez désuet peut être compris comme une décision du juge. Toutefois l’ordonnance du juge d’instruction n’est pas un jugement ou un arrêt. Elle n’emporte pas les mêmes conséquences pour le mis en examen. Même si une ordonnance de juge d’instruction de placement en détention provisoire qui dure pendant plusieurs années serait à mon sens complètement assimilable à un jugement de condamnation à une peine d’emprisonnement. Avec ce petit plus, que la personne emprisonnée est dans ce cas présumé innocent.
Le juge d’instruction rend plusieurs types d’ordonnance même si elles portent toutes le même nom. Les ordonnances du juge d’instruction vont être parsemées dans le dossier dont il a la charge. Nous allons voir quel type d’ordonnance existe et comment elles influencent une affaire. Ces ordonnances n’étant l’œuvre que d’un seul magistrat, elles peuvent aussi être contestées devant la Chambre de l’accusation de la Cour d’appel compétente.
Comme ordonnance de juge d’instruction, la première que va rencontrer une personne amenée devant la justice dans une affaire pénale est celle de mise en examen. Comme nous l’avons déjà vu, elle est prise à l’issue de l’interrogatoire de première comparution. La seconde ordonnance de juge d’instruction est celle qui concerne la détention provisoire. Si le juge d’instruction estime que le mis en examen ne dispose pas de garanties de représentation suffisantes ou pour un autre motif prévu à l’article 144 du Code de procédure pénale, il sollicite la détention provisoire du mis en examen. Cette ordonnance de juge d’instruction peut être contestée devant le juge des libertés et de la détention (JLD). Elle donne lieu à un débat contradictoire devant ce magistrat qui décide s’il y a bien lieu de placer en détention le mis en examen. C’est un premier exemple de situation où l’avocat de la défense va venir remettre en cause une ordonnance de juge d’instruction mais il y en a d’autres.
Il est à mon sens important de contester une ordonnance de juge d’instruction qui n’irait pas dans le sens des intérêts de la défense du mis en examen. Le Code de procédure pénal le permet dans de nombreuses situations. Devant le juge d’instruction, la défense a un rôle clé à jouer et ne doit pas laisser un juge d’instruction agir comme il ou elle le souhaite.
Prenons un autre exemple pour illustrer l’intérêt qu’il peut y avoir à contester une ordonnance de juge d’instruction. Le juge d’instruction a entendu de multiples témoins dans une affaire afin d’établir la culpabilité du mis en examen. Ces témoignages restent assez peu précis sur les faits (des détails importants manquent sur l’heure des faits ou le lieu de leur déroulement). La défense dispose d’un témoin qui peut fournir d’important détails. L’avocat demande au juge d’instruction d’entendre et d’auditionner ce témoin. Le juge refuse et rend alors une ordonnance car il estime que le témoignage en question ne servira pas à établir la vérité (en réalité c’est surtout que le témoignage n’ira pas dans le sens voulu par le juge). Il est possible de faire appel de cette ordonnance de juge d’instruction devant la Chambre de l’Instruction. Une audience se tiendra au cours de laquelle il faudra essayer de convaincre la Chambre de l’Instruction de l’intérêt de ce témoignage pour faire apparaître la vérité.
C’est également possible lorsque le mis en examen à travers son avocat formule une demande d’expertise technique. Une ordonnance de juge d’instruction de refus devra aussi être contestée. De plus, cette ordonnance doit être motivée. Le juge d’instruction doit préciser dans son ordonnance pourquoi il estime que cette expertise n’aidera pas à la manifestation de la vérité. La contestation d’une ordonnance de juge d’instruction est un contentieux propre à cette procédure mais il est assez volumineux. Il se heurte aussi il faut bien le dire à l’esprit corporatiste des magistrats qui n’aiment pas par principe remettre en cause l’appréciation de l’un des leurs notamment dans des dossiers criminels. Mais ce n’est pas parce qu’il y a peu de chance d’obtenir gain de cause qu’il ne faut pas essayer.
Cette ordonnance de juge d’instruction est donc un acte contestable par le mis en examen lorsqu’il estime contrairement au juge d’instruction que la manifestation de la vérité pourrait être atteinte si on lui accordait le bénéfice de sa demande d’acte. Le principe du procès équitable fait que la personne mise en examen ne doit pas croire que c’est le juge d’instruction qui va décider de son sort et que l’affaire est déjà jugée. Le Code de procédure pénale sert réellement cet objectif de permettre à la défense d’intervenir tout au long d’une instruction et encore plus lorsqu’elle est menée plus à charge qu’à décharge.