Droit pénal patrimonial : un enjeu majeur souvent éclipsé par la peine
Le droit pénal patrimonial constitue aujourd’hui un domaine particulièrement important du droit pénal. Pourtant au vu des enjeux financiers qu’il représente, il est bien souvent mis de côté et on a tendance à ne pas s’en préoccuper. Les chiffres sont criants : les confiscations pénales représentent plusieurs millions d’euros par an et génèrent des intérêts qui se calculent en million également pour l’État.
Depuis une dizaine d’année le droit pénal patrimonial est devenu une lubie pour l’État mais également pour l’Union Européenne. Plusieurs cadres internationaux ont été posés via des décisions cadres et des règlements européens. A cela il faut ajouter les dispositions françaises en la matière. L’objectif affiché : le crime ne paiera pas.
Et en effet, on peut dire que les gouvernants ont mis le paquet pour que l’arsenal répressif soit au niveau. On en est à un point, où on pourrait même dire qu’il déborde, tant l’interprétation de la cour de cassation est extensive et permissive en matière de saisine par l’État de biens liés à une infraction pénale.
A contrario en droit pénal patrimonial, les voies de recours sont plus ou moins inexistantes ou dysfonctionnent sérieusement. Un justiciable qui contesterait une saisine ou une confiscation va devoir attendre de très long mois voir parfois des années pour que sa cause soit entendue par une juridiction. Et pendant ce temps-là, ses biens et autres avoirs restent en possession de l’État.
Il existe deux méthodes principales par lesquels l’État va prendre le patrimoine d’une personne privée (physique ou morale) : la saisine et la confiscation. Ces deux procédés interviennent dans un ordre précis et correspondent à des temps du procès pénal différent.Ils seront détaillés plus en longueur sur d’autres pages. A ce stade, il est surtout important de savoir faire la différence entre les deux.
Le saisine pénale consiste pour l’État à saisir un bien meuble ou immeuble d’une personne physique ou morale car il estime que ce bien serait susceptible d’avoir pu être utilisé pour commettre l’infraction par exemple (d’autre cas sont prévus même si le bien n’a pas été utilisé pour commettre l’infraction, mais ce n’est pas le sujet encore une fois de cette page). Cette saines rend le bien inutilisable par le mis-en-cause.
Pour donner un exemple simple, une personne est interpellée et suspecté d’avoir commis un vol en s’enfuyant avec sa voiture. Cette dernière sera saisie par la justice pénale.
C’est la particularité de la procédure de saisine : elle précède la condamnation définitive de l’accusé ou du prévenu. En application de l’article préliminaire du Code de procédure pénal, ce dernier est pourtant présumé innocent. Mais cela n’empêche pas l’État de le priver de la jouissance de son bien.
Encore un exemple du vide de la notion de présomption innocente dans le droit pénal contemporain.
La confiscation intervient dans un second temps. Elle permet à l’État de s’approprier définitivement le bien d’une personne condamnée. Toutefois les possibilités pour l’État de s’approprier les biens d’une personne condamnée sont très larges, et ne se limite pas seulement à celles dont cette dernière à la possession.
Pour reprendre mon exemple précédent, si le juge pénal le décide la voiture de l’intéressé sera confisquée et elle appartiendra à l’État qui la revendra aux enchères par la suite.
C’est une agence créée en 2010 qui a la charge de gérer notamment la vente des biens confisqués : l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC).
Il apparaît que le droit pénal patrimonial englobe des enjeux fondamentaux pour les intérêts du justiciable qui doit impérativement se faire assister et se défendre car au nom de sa doctrine du « le crime ne paiera pas », l’État n’hésite pas à marcher largement sur le droit de propriété pourtant lui aussi protégé.