Dénonciation calomnieuse : une infraction difficile à prouver
La dénonciation calomnieuse fait partie de ces infractions dont on entend très souvent parler sans vraiment comprendre ce qu’elle renferme en réalité. Dés qu’une personnalité se retrouve accusée d’un quelconque fait, cette dernière s’empresse généralement de dire qu’elle portera plainte pour dénonciation calomnieuse ou diffamation à l’encontre de celui ou celle qui serait à l’origine de la procédure.
Pourtant cette infraction ne se résume pas à cette simple situation. Avant de porter plainte pour diffamation, il est important d’avoir une idée des éléments qui composent l’infraction pour savoir si la procédure a une chance d’aboutir.
Prévue à l‘article 226-10 du code pénal, elle se classe dans la catégories des atteintes à la personnalité. La personne qui est poursuivie pour dénonciation calomnieuse encourt au maximum cinq années d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
Des peines complémentaires sont prévues pour les personnes morales qui auraient été déclarées coupable de l’infraction.
Le délit se compose de deux éléments : d’abord il faut que la dénonciation concerne une personne déterminée d’un fait qui est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires et ensuite il faut avoir la connaissance de l’inexactitude totale ou partielle du fait dénoncé.
Première chose : il faut que le fait soit de nature à entraîner une sanction. Ça sera évidement le cas d’une infraction prévue par le code pénal mais il peut aussi d’agir administrative ou disciplinaire. Par exemple dans le cadre du travail non-autorisé, au-delà du volet pénal, il existe un volet administratif contre l’employeur. Il peut aussi s’agir de dénonciation envers une autorité disciplinaire comme un ordre professionnel (ordre des médecins, des avocats, des kinésithérapeutes etc).
Pour le simplifier, si aucune sanction n’existe pour le fait dénoncé, l’infraction ne sera pas constituée.
Seconde chose : la connaissance que le fait dénoncé est inexacte. C’est clairement ce qui est le plus difficile à démontrer. La personne à l’origine de la dénonciation peut très bien croire que le fait qu’elle dénonce est vrai même si elle n’est pas réellement en mesure de le prouver. Toutefois ne pas pouvoir le prouver ne signifie pas qu’elle avait la connaissance que le fait était inexacte.
Un exemple simple : si je dénonce mon voisin pour tapage nocturne parce que je constate qu’il y a du bruit chez lui, et que pourtant ce bruit n’est pas suffisamment fort pour que le tapage nocturne soit constaté, je n’ai pas fait une dénonciation calomnieuse car je me suis simplement trompé. Ou du moins il sera impossible de démontrer qu’au moment où j’ai alerté la police, je savais bien qu’il n’y avait aucun bruit.
C’est la raison qui rend très difficile la poursuite de ce délit sans preuve matérielle directe. Un échange, dans lequel il serait constaté que la personne qui va faire la dénonciation précise qu’elle sait très bien que les faits sont inexacts mais qu’elle va quand même déposer une plainte, serait une preuve de cette nature.
Pour constater que le fait est faux, il faut une décision « devenue définitive, d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que le fait n’a pas été commis ou que celui-ci n’est pas imputable à la personne dénoncée. » C’est-à-dire qu’il faut clairement que la personne poursuivie ait été innocentée. Cela signifie donc qu’il faudra souvent attendre plusieurs mois voir probablement années pour qu’on puisse constater que le fait soit faux.
Si la fausseté du fait n’est pas démontrée par une procédure judiciaire, c’est à l’appréciation du Tribunal correctionnel qu’il reviendra de déterminer si les accusations portées par le dénonciateur pouvaient être fausses (et qu’il a agit en toute connaissance de cause).