Contre-expertise en droit pénal : une procédure difficile à mettre en œuvre pour la défense
La contre-expertise en droit pénal est un acte sollicité par la défense ou bien par la partie civile. Étrangement ce type de mesure intervient plus souvent dans les domaines techniques (médico-légal) que dans les domaines comme la psychiatrie ou la psychologie. L’objet d’une contre-expertise en droit pénal consiste à demander à un second expert d’intervenir pour obtenir un avis sur une question technique pour laquelle la juridiction estime que cet avis est nécessaire ou bien si la loi le prévoit.
Les mesures d’expertises peuvent être prises par de nombreuses juridictions : tribunal correctionnel, juge d’instruction, procureur de la république. Il n’est pas nécessaire que la juridiction soit saisie d’une demande, elle peut si elle l’estime nécessaire à la manifestation de la vérité solliciter une expertise.
Toutefois, il n’est pas question ici de l’expertise qui a déjà été traitée, mais bien de son pendant la demande de contre-expertise en droit pénal. Il faut comprendre à quoi sert une contre-expertise et comment il est possible de la demander. Car le ou les magistrat(s) ne sont généralement pas enclin(s) à accorder une telle mesure. Deux raisons à cela : la raison officielle souvent invoquée que cela n’est pas nécessaire à la manifestation de la vérité car la première expertise est suffisante selon eux et une raison plus officieuse qui est qu’une contre-expertise en droit pénal coûte de l’argent à l’État et que sauf s’il n’est pas possible de faire autrement, il vaut mieux éviter de dépenser de l’argent public sur le seul principe de droits de la défense et du contradictoire.
La possibilité de solliciter une contre-expertise en droit pénal est prévue par l’article 167 du Code de procédure pénale : « Dans tous les cas, le juge d’instruction fixe un délai aux parties pour présenter des observations ou formuler une demande, notamment aux fins de complément d’expertise ou de contre-expertise. » La forme de cette demande de contre-expertise est prévue par l’article 81 du même code. Elle se fait par déclaration auprès du greffe du juge d’instruction.
Sur quel fondement est-il possible de solliciter une contre-expertise en droit pénal ? Au départ, il s’agit évidement de faire respecter le principe du contradictoire à savoir que chaque partie (mis en examen et procureur de la république) a le droit de contester les conclusions d’un expert si elle estime que celles-ci ne vont pas dans son sens. Mais cela sous réserve que l’expert ait manqué à ses obligations.
Lorsqu’un expert est saisi par une juridiction pénale, il doit prêter serment d’accomplir sa mission en toute indépendance. Cela signifie qu’au cours de sa mission, il ne doit pas prendre parti. Par exemple, si en interrogeant le mis en examen, l’expert emploie des mots comme : « vous avez commis tels actes sur Monsieur X, n’avez-vous pas honte ? », il est manifeste que son indépendance peut être questionnée.
C’est également le cas par exemple lorsqu’il existe des contradictions dans le rapport de l’expert. Dans les cas d’irresponsabilité pénale, cela peut venir du motif invoqué par le mis en examen quant l’abolition de son discernement.
La demande de contre-expertise en droit pénal est faite par l’avocat du mis en examen dans un délai de 15 jours à compter de la notification des conclusions du rapport d’expertise. Le juge d’instruction doit y répondre dans un délai d’un mois à compter de la demande faite. En cas de refus, il doit rendre une ordonnance motivée en précisant selon lui pourquoi la contre-expertise sollicité n’est pas utile à la manifestation de la vérité. S’il ne répond pas dans ce délai, la partie qui a sollicité la contre-expertise peut solliciter la Chambre de l’instruction.
Du point de vue de la défense, la demande de contre-expertise peut avoir un double intérêt. En premier lieu, si elle fonctionne cela va permettre d’obtenir un second avis sur un élément de personnalité ou technique alors que les premières conclusions du premier expert étaient très défavorables. Dans un second lieu, en cas de refus (ce qui arrive souvent), cela pourrait être soulevé au cours de l’audience pour démontrer la faiblesse du dossier de l’accusation.